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Livre
La passeuse
Edité par Grasset - paru en 2017
En 1942, Bernard Prazan, 7 ans, et sa soeur sont confiés à une passeuse pour qu'elle les fasse passer en zone libre. Au moment du départ, l'enfant comprend au regard qu'elle lance à l'homme qui les accompagne qu'elle va les livrer à la Gestapo. Mais elle se ravise. Michaël, le fils de Bernard, a retrouvé cette femme qui lui a raconté son histoire dans le film La passeuse des Aubrais. ©Electre 2017
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La passeuse
Ce récit fait suite à un documentaire, La passeuse des Aubrais, diffusé sur Arte en juin 2017 et multi-primé. À la gare des Aubrais, non loin de la ligne de démarcation, Thérèse lance un regard ambigu aux 2 jeunes enfants qui l'accompagnent. Il s'agit de Bernard et Jeannette âgés de 7 et 10 ans. Ils sont juifs, nous sommes fin juillet 1942 (une dizaine de jours après la rafle du Vél' d'Hiv') et ils ont été confiés à cette femme pour être mis à l'abri en zone libre. Bernard n'oubliera jamais ce regard et dans les récits parcimonieux qu'il fera plus tard de cet épisode, il évoquera toujours sa conviction : Thérèse était de mèche avec la Gestapo et pourtant, ce jour-là, elle a décidé de faire passer les enfants. Ce livre n'est pas un roman. Le narrateur est le fils de Bernard; et c'est par l'intermédiaire d'une enquête sur les enfants juifs rescapés menée par l'INA où il l'amène pour qu'il y raconte sa vie d'enfant juif pendant la guerre. qu'il va obtenir de celui-ci des détails encore non transmis sur ce passage. Dans une seconde partie et alors que son père vient de mourir, c'est la retranscription de l'entretien avec Thérèse - finalement retrouvée et âgée de 94 ans - qui va mettre en lumière les circonstances de ce périple mais aussi ses conséquences avec des détails poignants sur le prix qu'elle a payé pour son acte de bravoure, sur l'affection qu'elle a toujours gardée en son coeur pour ce jeune garçon. Tandis que la troisième partie parle des retrouvailles qui auraient eu lieu entre Bernard et Thérèse dans les années 60. J'ai trouvé bouleversante l'histoire de ce jeune garçon devenu homme, les multiples circonstances qui l'ont épargné, ses relations avec son fils, avec la vie. Comme l’auteur, je me suis posée la question: qui croire ? Pourquoi la passeuse serait-elle une donneuse repentie au dernier instant alors qu'elle était venue arracher auparavant les enfants aux griffes de son associé (le collaborationniste Pierre Lussac), dont elle venait de découvrir qu'il était le plus abominable des salopards ? Et pourquoi son père n'avait-il jamais dit à ses enfants que Thérèse l'avait retrouvé dans les années 1960 et qu'il connaissait ses épreuves ultérieures ? Toute la tension de ce livre qui va crescendo tient dans cet embarras du fils qui a ouvert une boîte de Pandore. De sa dette, double, envers le père, envers Thérèse, qui l'amène à confronter deux versions de l'histoire ne coïncidant pas vraiment. D'un côté, le silence du père mort. De l'autre, la parole, tardive, in extremis, de la passeuse retrouvée, mais qui mourra aussi en 2012. Un livre à lire absolument!
ACZ - Le 09 juillet 2018 à 19:01