CSS
De février à juillet 2022, cycle musical à la Médiathèque musicale de Paris Folkways Records : un label américain à l’écoute du monde !
Pochette de l'album American Banjo - Tunes and Songs in Scruggs Style (Folkways Records, 1957)
De février à juin, La Médiathèque Musicale de Paris vous invite à un vertigineux voyage au cœur du label Folkways Records. En 40 ans d’activité, ce label new-yorkais créé par Moses Asch a constitué un catalogue cosmopolite de musiques venues du monde entier. Du field recording à la musique pour enfants, en passant par d’incontournables légendes du blues, du jazz et de la folk music, l'exposition proposée par la Médiathèque musicale de Paris présente plus de 250 vinyles conservés dans les collections patrimoniales de la médiathèque. Ce large panorama musical, illustré notamment par les pochettes réalisées par Ronald Clyne et David Gahr, associe les grands classiques de Leadbelly, Lightnin’ Hopkins, Pete Seeger et Woody Guthrie avec de nombreuses autres curiosités témoins des « archives sonores du monde ».
Parmi les plus importantes expositions de vinyles jamais organisées par la Médiathèque Musicale de Paris depuis sa création, Folkways Records : un label américain à l’écoute du monde ! revient sur l’histoire d’une maison de disque unique en son genre. Fondée en 1948 à New York par Moses « Moe » Asch, elle constitue un fabuleux héritage de plus de 2000 références discographiques publiées en 40 ans d’activités. Difficile d’en parler sans évoquer la vie de son fondateur. Né en 1905 en Pologne et fils d’un écrivain et dramaturge yiddish, Moses Asch suit ses parents en 1915 à Paris, puis à New-York, avant de faire des études d’électrotechnique en Allemagne. Il se voit reprocher d’être juif et américain. De retour à New-York, il est embauché dans les années 30 par la radio WEVD (Woodhaven Emitting Victor Debs) pour réparer des émetteurs. Elle lui propose aussi un contrat pour enregistrer de la musique yiddish à diffuser lors de grandes fêtes. Moses monte alors un petit studio où il enregistre bon nombre d’artistes, bien au-delà du genre, au point de fonder Asch Records en 1938.
Durant les années 40, le succès de son label est grandissant. Il publie notamment les disques de Leadbelly, un bluesman dont le vaste répertoire rivalise avec une vie empreinte de violence. En 1943, Asch s’associe avec Stinson Records, et lance le label DISC ; mais ce dernier fait faillite après l’échec d’un album de Noël interprété par Nat King Cole, qui ne put être livré à temps à cause d’une tempête de neige. Cette déconvenue le rend prudent et lui donne envie d’une grande autonomie dans la gestion de son nouveau label, baptisé Folkways Records. Fort d’une collection monumentale d’enregistrements, il continue à sortir les albums de pionniers du blues comme Lightnin’ Hopkins ou Champion Jack Dupree, un ancien boxeur reconverti dans la musique. Son studio accueille aussi des stars du jazz comme Art Tatum et Mary Lou Williams, l’une des premières femmes pianistes reconnues sur la scène américaine. Suivent aussi les figures de la folk music en mode prostest-singers avec Cisco Houston, Woody Guthrie et bien sûr Pete Seeger.
Les albums produits par Moses se distinguent aussi à travers son goût pour les enregistrements flat, sans artifices.
En revanche, Asch soigne particulièrement le design de ses publications afin de se démarquer des autres maisons de disque. Il veut que la pochette soit le plus proche possible des contenus musicaux de chaque disque, grâce à des artistes comme le graphiste Ronald Clyne ou le photographe David Gahr.Ses pratiques de sélections sont également très singulières. Il édite quantité de documents sonores à vocation plus scientifique que lui amènent des ethnomusicologues, photographes, explorateurs ou aventuriers venus du monde entier. Il intègre aussi à son catalogue des chansons pour la jeunesse, à la fois pédagogiques et divertissantes, de la musique classique avec le compositeur Charles Ives ou avant-gardiste avec John Cage. Ses critères de choix sont simples : se fier à son intuition, connaitre la personne qui fournit le matériel et chercher l’originalité pour la collection. Selon son fils, l’ethnomusicologue Michael Asch, c’était l’une de ses principales motivations, nourrie par ses lectures sur la Seconde Guerre mondiale, en particulier sur l’holocauste. « Regarde cette horreur ! » lui disait-il. « Il faut faire quelque chose pour que, si jamais cela devait arriver à d’autres, ils aient quelque chose à quoi se raccrocher! »
Vues de l'exposition "Folkways" qui se déroule jusqu'au 30 juin 2022 à la Médiathèque musicale de Paris
L’impact de Folkways Records est tout à fait significatif, pour la musique folk américaine, de la publication des anthologies d’Harry Smith à la mise en lumière de nombreux artistes des années 1920 et 30. Le label a aussi accompagné le folk revival new-yorkais des années 60. Mais aussi et surtout il fait connaître les musiques du monde, parcourant tous les courants et les pays.
Après la mort de Moses Asch en 1986, catalogue et archive ont été légués par sa famille au Smithsonian Center for Folklife and Culture Heritage, une unité de la Smithsonian Institution. En échange de cette acquisition, l’institution perpétue sa volonté et poursuit l’édition des références Folkways.
La Médiathèque Musicale de Paris, elle-aussi proche de l’idéal cosmopolite de Moe, a pour habitude d’ouvrir des pistes au sein du monde de la musique. Cette exposition sur le label Folkways nous en donne à voir et à entendre au gré d’un superbe voyage à travers le temps et les continents.
Le label Folkways en écoute
Cliquez dans la cartographique ci-dessous pour écouter les différents mixes issus des collections Folkways de la Médiathèque musicale de Paris.
Découvrez également la bande-son de l'exposition en écoute.
Par Julien Gaisne, Médiathèque musicale de Paris