Elle a donné son nom à l'une des bibliothèques de notre ville et il y a 50 ans, ce fut la première femme à entrer au Collège de France. A l'occasion de cet anniversaire, découvrez la vie et l'oeuvre de Jacqueline de Romilly.

Helléniste renommée, Jacqueline Worms de Romilly, née Jacqueline David en 1913, fait partie des quelques intellectuels français à devenir à la fois une référence mondiale dans son domaine, et une voix qui compte dans le débat public, représentante respectée de la société civile sur les questions liées à l’enseignement.

De son parcours académique exemplaire, on ne peut qu’admirer sa capacité à dépasser les limites autrefois imposées aux femmes : première femme à remporter le concours général en 1930 à 17 ans (premier prix de latin et deuxième de grec ancien, ce qu’elle désignera plus tard comme « sa plus grande heure de gloire »[1]), première femme professeur[2] au Collège de France en 1973, deuxième femme élue à l’Académie française en 1988 (mais première à y siéger vraiment, selon ses propres mots).

Grande spécialiste de Thucydide, auquel elle consacra sa thèse, Jacqueline de Romilly fut invitée par les plus prestigieuses universités pour dispenser un enseignement fondé sur une étude extrêmement approfondie des textes en eux-mêmes, dans une démarche qu’elle revendiquait avant tout littéraire. De son importante production scientifique, c’est l’expertise des textes qui constitue l’élément central. Outre ses nombreux ouvrages sur la culture et la pensée grecques, son impressionnante traduction de l’œuvre complète de Thucydide, parue en six volumes entre 1953 et 1972, témoigne de la précision et de la qualité de son travail.

À partir de la fin des années 80, confrontée à des problèmes de vue lui compliquant considérablement l’étude des textes, elle oriente sa production écrite vers des ouvrages confrontant la culture grecque aux questions contemporaines. Fondatrice de l’association Sauvegarde des enseignements littéraires en 1992, elle s’investit activement dans les questions d’éducation et plaide pour le maintien de l’enseignement des lettres classiques dans les collèges et lycées, convaincue de l’apport des textes antiques à l’éducation des jeunes. Comme elle l’explique dans son discours sur l’enseignement et l’éducation prononcée sous la Coupole en 2008, il est indispensable selon elle de donner aux enfants et aux jeunes les outils qui leur permettront de manier avec aisance la langue française, mais aussi de connaître le passé, car « tout avenir se construit en fonction d’un passé qui vous aide et vous porte plus loin ». Et pour elle, « la connaissance du passé rendu vivant et présent [se trouve] dans la littérature »[3].

Amoureuse des lettres, amoureuse des mots et de la langue, Jacqueline de Romilly écrit aussi des romans, des nouvelles et des essais. Après un premier roman en 1945 (3^e classe, chez Gallimard, sous le pseudonyme de Jacqueline Rancey), son œuvre littéraire s’enrichira à partir de 1987 et la parution de son ouvrage Sur les chemins de Sainte-Victoire, aux Éditions de Fallois. Succès de librairie, ce titre séduit un lectorat qui restera fidèle à son style fluide et élégant, du roman Ouverture à cœur en 1990 à son dernier récit, Les Révélations de la mémoire, en 2009.

A noter que le 26 juin 2023, en guise de célébration nationale, le 50ème anniversaire de l'entrée de Jacqueline de Romilly au collège de France sera célébrée.

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