Zoom sur... La nouvelle scène française féminine
A l’occasion du Printemps de la chanson, la Médiathèque musicale de Paris a proposé le 21 avril dernier, un petit déjeuner musical sur la « Nouvelle scène française féminine », dont voici un court résumé...
En perpétuel renouvellement, la chanson française de ces vingt dernières années métamorphose le vocabulaire hérité de ses aînés et l’inscrit dans une perspective contemporaine, dans les textes comme en musique.
Les prémices
Il aura fallu attendre longtemps pour que les innovations de la Nouvelle Vague du cinéma français des années 60 déteignent enfin sur la chanson. Tant par les techniques musicales employées que par les thèmes abordées (textes touchant à l’intime, à l’anormalité du quotidien), il est possible de faire un rapprochement entre ces deux pôles culturels et créatifs. Ainsi parle-t-on aujourd’hui de la "Nouvelle Scène", mais on pourrait aussi justement avancer l’expression "chanson d’auteur" en comparaison avec le septième art et son "cinéma d’auteur".
Avec des artistes tel que Dominique A (La Fossette en 1992), Miossec (avec Boire en 1995), Katerine, Thomas Fersen (avec Les Ronds de carotte en 1995), Juliette (Qué tal 1991) dont la carrière a débuter dans les années 90, on a là certainement les François Truffaut, Agnès Varda ou Éric Rohmer de la nouvelle vague.
Cette première génération de la « nouvelle scène » apparait alors en rupture avec la grande chanson à texte de Léo Ferré, Brassens, Jacques Brel mais aussi avec la variété populaire de Michel Sardou, d’Alain Souchon, de Laurent Voulzy.
Deuxième génération scénique
C'est Henri Salvador qui a ouvert la voie à la deuxième nouvelle génération de ce qu on appelle la nouvelle scène en collaborant avec pour le texte avec Keren Ann Zeidel et Benjamin Biolay sur la chanson « Jardin d'hiver » en 2000 qui connu un immense succès entrainant son album Chambre avec vue au-delà du million de vente. Puis il a laissé la première partie de ces concerts à Bénabar. C'était un véritable coup de pouce à cette génération qui avait du mal à s'affirmer devant ces modèles.
Leur succès s’est fait en grande partie grâce à la scène. C'était des salles de concert pleines d artistes inconnues à la télévision et rarement diffusé à la radio témoignant du décalage entre le spectacle vivant et sa représentation dans les média.
Il s'agit là d'une génération d'auteurs, compositeurs et interprètes qui a surgi comme un antidote aux candidats préfabriqués de la Star Academy. Les radios mainstream qui finissent par s'y intéresser cherchent un nom pour les désigner et les différencier de la variété classique, on entend alors le terme Nouvelle scène française. Ce terme sera finalement consacré. La Nouvelle scène française est donc une appellation récente pour désigner une partie de la chanson francophone.
Ces artistes n'avaient pourtant pas grand-chose en commun, sinon le fait d'émerger simultanément, d'avoir entre 20 et 30 ans, et de chanter leur vie d'une façon libérée comme, avant eux, l'avaient fait Souchon, Chatel, Cabrel, Voulzy, Jonasz… Ces cadors de la "Nouvelle chanson française", génération post-68 représentait dans les années 70 une rupture avec la chanson réaliste et le show business mais paradoxalement, est devenu , au cours des décennies suivantes, un symbole d'embourgeoisement et de réussite industrielle sur le plan musical.
Et puis la chanson des années 2000 a une autre caractéristique : elle se féminise. Les chanteuses font preuve d'audace dans leur voix, dans leurs écritures, leurs musiques.
Vers une troisième génération…
Cette "chanson d’auteur" depuis 20 ans perdure, s’embellit et s’enrichit régulièrement avec l’apparition de nouveaux noms, de nouveaux angles, de voix et d’écritures toujours singulières. Les artistes s’illustrent autant par leur goût du risque musical que par leur langue souvent poétique et novatrice.
Depuis la dénomination «la Nouvelle scène française » s’est étendue de telle sorte que la plupart des artistes sont rangés dans cette catégorie- et qu’on pourrait presque y voir la naissance d’une troisième génération...
Une scène foisonnante en perpétuelle renouvellement
Pour conclure, on constate que depuis 20 ans, la « Nouvelle scène française féminine » ne se laisse pas définir facilement et tout comme ses représentantes elle échappe aux classifications hâtives.
Parmi elles, vous avez pu voir que :
• certaines était bénéficiait d'un succès critique, d'autres sont à peine connues
• certaines ont une longue carrière d’autres n'ont fait qu’un album
• certaines ont une voix puissance et un jeu de scène exubérant, d'autres ont une voix menue et une pose timide,
• certaines chantent la joie de vivre, et rayonnent d'énergie, d'autres murmurent l'amertume et la mélancolie,
• certaines sont sophistiquées et fantasques, d'autres directes et provocantes
Néanmoins l'ensemble des chanteuses est cohérent, avec ses doutes, ses recherches, ses fragilités et singularités et j’espère qu’avec cet article, vous avez pu découvrir ou redécouvrir les multiples facettes d'une chanson française au féminin…
Par Dora BALAGNY, Pole Médiation – Médiathèque Musicale de Paris
Le Printemps de la chanson s’est achevé à la médiathèque, mais vous pouvez retrouvez le contenu de l’exposition « Original vs Reprises : chanson à l’ADN musicalement modifié » en ligne. Au programme, l’histoire de vingt reprises de chansons à (re-)découvrir, une playlist, un blind-test et la captation de la conférence « L’art de la reprise : entre création et re-création » avec Olivier Hussenet (Hall de la chanson), Dominique Blanc-Francard (Labomatic Studios) Sanseverino et Daphné.