Spécial Nouvelle Orléans / épisode 4 Le blues
Photography Collection, The New York Public Library. "Sunday afternoon in New Orleans, Louisiana". NYPL.
A l’occasion du carnaval de la Nouvelle-Orleans, les bibliothécaires vous proposent de découvrir la musique de cette ville pas comme les autres. Episode 4.
Le blues à la Nouvelle Orléans est à l'instar de la ville, c'est à dire extrêmement métissé.
Deux styles de blues se sont développés après la Seconde Guerre mondiale. On trouve le New Orleans blues, le blues de la Nouvelle-Orléans et le Swamp blues le blues de la ville de Bâton Rouge (capitale de la Louisiane à une centaine de km seulement de la Nouvelle-Orléans). Ces deux genres de blues ont connu leur heure de gloire dans les années 1950 et 1960. Seulement depuis plusieurs années, on redécouvre des musiciens de blues oubliés qui ont pourtant influencé durablement nombre d'artistes de rock.
Le New Orleans Blues
Le blues qui s'est développé dans les années 1940 et 1950 à la Nouvelle- Orléans a été fortement influencé par le jazz et les musiques caribéennes.
Il est dominé par le piano et le saxophone ou la guitare.
Parmi les figures majeures du genre, on trouve le pianiste Professor Longhair et le guitariste Guitar Slim.
Ce style de blues est généralement gai, ce qui peut paraître étonnant à première vue pour du blues. Il se distingue aussi par l’utilisation d’un tempo modéré assez décontracté ainsi que des rythmes complexes. Il est directement à l’origine du Rythm’n’ Blues. Le pianiste de blues le plus important est le Professor Longhair. Il utilise non seulement le jazz et le swing mais il fait appel aussi à des rythmiques issues du mambo, de la rumba et du calypso…bref, un blues sous influences !
La plupart des représentants du New-Orleans Blues finiront par goûter aux joies du Rythm’n’blues, ce qui permettra pour certains, de vivre un peu de leur musique. Difficile de ne pas citer un des grands oubliés du blues de la Nouvelle-Orléans : le pianiste et organiste James Booker, aussi à l’aise au piano blues qu’à l'orgue.
Passons maintenant à la guitare avec le guitariste Guitar Slim. Il apporte une touche plus urbaine et électrique au blues de la Nouvelle Orléans. Il a beaucoup renouvelé la façon de jouer de la guitare électrique. Son approche est brute et incendiaire, ses harmoniques sont altérées. Chanteur passionné et showman flamboyant, Guitar Slim est surtout connu pour son enregistrement du classique "Things That I Used To Do"qui fut un grand succès en 1954. Sa carrière est de courte durée Guitar Slim souffrant d’une forte addiction à l’alcool il meurt en 1959. Son influence est considérable pour toute une génération de guitaristes de Buddy Guy en passant par Jimi Hendrix et Stevie Ray Vaughan). Il inspira également durablement Ray Charles.
Les carrières de nombreux bluesmen de la Nouvelle-Orléans ont décliné dans les années 1960 avec l’avènement du Rythm’n’ Blues de la soul et du rock and roll.
La plupart des maisons de disques de blues indépendantes ont déposé le bilan. Heureusement, dès les années 1970, il y a un regain d'intérêt pour ces musiciens de blues en Europe et particulièrement en France. A la faveur de nombreuses rééditions des enregistrements longtemps mésestimés ressortent.
Aujourd’hui le blues est toujours vivant à la Nouvelle Orléans notamment avec de nouveaux artistes artistes tel Snooks Eaglin et surtout avec un festival de grande renommée, le « New Orleans Jazz & Heritage Festival. »
Le Swamp Blues
Le second type de Blues est le Swamp blues (ou blues des marais). Il prend sa source à Baton rouge le long du Mississipi en plein pays cajun. Ici le blues cohabite harmonieusement avec les musiques locales : le cajun et le zydeco.
C’est une des formes les plus attachantes du blues des années 50. Des voix rocailleuses, des harmonicas plaintifs, des guitares au son lourd et menaçant, des effets de percussion entêtants et des rythmes lancinants. On sent presque la chaleur moite des marécages !
Le son du swampblues se caractérise par l'utilisation de réverbe, une pulsation ternaire, un harmonica incandescent. Sans oublier un recours systématique aux trémolos à la guitare.
Un producteur, Jay Miller, contribue à faire sortir de l'anonymat cette musique encore très obscure à l'époque grâce à son label Excello. On peut dire qu’il a contribué presque autant que les artistes, à l’éclosion et la diffusion du Swamp Blues.
L'artiste le plus emblématique et le plus influent est sans hésitation le guitariste et harmoniciste Slim Harpo. La musique de Slim Harpo peut paraître simple, une voix trainante et nasillarde, un accompagnement sobre - quelques riffs de guitare, une basse, une batterie et quelques phrases d’harmonica- mais il faut entendrele swing intense et contrôlé... l’humour débridé des compositions et cette atmosphère indéfinissable qui est l’essence même du Swamp Blues.
De nombreux titres de Swamp blues ont été repris par les groupes de la pop anglaise des années 60 outre les Rolling Stones, The Kinks , les Yardbirds, les Pretty Things, les Them…
Tous ont puisé à la source du Swamp Blues et après l’avoir copié et pillé, ils l’ont fait connaître un peu partout dans le monde. Ainsi le blues au même titre que le jazz est devenu une musique universelle. D’autres artistes plus récents sont aussi influencés par ce blues comme Neil Young, le Creedence Clearwater Revival et bien sûr le louisianais Tony Joe White
Bâton Rouge célèbre chaque année le blues avec son Baton Rouge Blues Festival. C’est le plus grand événement de musique blues de toute la Louisiane. Durant une semaine entière, la capitale de la Louisiane vit au rythme des sons Blues et accueille de nombreux artistes reconnus.
Impossible de ne pas citer une femme, une native de Louisiane, la pianiste et chanteuse Marcia Ball et son blues festif et coloré empreint d'une bonne humeur communicative.
En écoute
Par Jean-Pierre B., bibliothèque Chaptal